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Les lycéens et nous : question(s) de mémoire(s)
lundi 18 avril 2016, par
A l’heure où Patrick Buisson tente de ressusciter le mythe de l’Algérie française, et où la colonisation continue à être parée de tous les bienfaits par les nostalgiques de « l’empire », il est bon de rappeler certaines vérités sur ce « passé qui ne passe pas », et de le faire notamment auprès des jeunes à travers ce que nous avons vécu au moment de la guerre d’Algérie.
Nous sommes donc allés le 18 mars dernier au lycée de Gisors, dans l’Eure, à la rencontre d’élèves de trois classes de terminale : deux appelés, un fils de moudjahidine et un Pied-noir, ces deux derniers ayant vécu leur enfance en Algérie jusqu’en 1962. Echanges directs, parfois émouvants, entre des jeunes avides de connaître mieux ce qui s’est passé, et quatre intervenants d’horizons différents, donc complémentaires.
Quelques jours après notre venue, les enseignants ont demandé à leurs élèves de noter par écrit leurs impressions, qu’ils nous ont ensuite transmises. Ces réactions étant, à l’évidence, plus intéressantes qu’un simple compte-rendu, en voici une synthèse que je pense représentative de la journée.
Audrey : « moment enrichissant, car nous avons eu la chance de rencontrer réellement des personnes ayant vécu cette période, ce qui change totalement du témoignage écrit, qui est figé (….) communiquer est très important : j’ai un oncle qui a été envoyé en Algérie et qui ne nous a jamais rien dit sur son « expérience », et il est malheureusement trop tard pour qu’il partage son histoire (….) merci et longue vie à votre association ».
Sophie : « le fait que vous ayez témoigné pour nous est, selon moi, aussi important que les actions que vous menez avec vos associations (….) après cette guerre, ce que vous faites au nom de la liberté, de la paix, est remarquable, et cela nous donne de l’espoir (….) vous avez cité Le Déserteur de Boris Vian, cette référence me tient à cœur, cette chanson représente beaucoup pour moi, c’est un hymne à la paix que tout le monde devrait connaître et chanter (…. ) de même, on devrait entendre davantage parler de vous et de vos actions (….) je n’ai pas eu la chance de connaître mes grands-pères, je ne sais pas s’ils ont participé à cette guerre, je n’ai jamais pu en parler avec quelqu’un (….) tout ce que je peux vous dire, c’est un grand merci ! »
Marion : « vous avez su faire passer votre message, celui de ne pas oublier le passé, de ne pas refaire les mêmes erreurs, d’avancer et de communiquer au lieu de faire la guerre, de choisir la paix quand elle est possible »
Alisson : « j’ai trouvé bien qu’il y ait des Français et un Algérien, cela a permis un double regard, je dirais même un triple regard avec celui de l’intervenant Pied-Noir (…. ) j’ai moi-même un oncle qui a été appelé en Algérie, malheureusement je n’ai jamais eu l’occasion d’en parler avec lui, mais peut-être que maintenant je pourrai lui poser quelques questions… »
Jenny : « votre message de paix m’a particulièrement touchée et m’a ouvert les yeux sur certaines choses…. à part en histoire, on ne parle pas forcément des guerres ; c’est dommage puisque nous sommes censés apprendre de nos erreurs, et le seul moyen de le faire c’est d’en parler (….) vous nous avez offert un point de vue subjectif, ce qui change de l’objectif, souvent dénué d’émotion et d’expérience, je vous remercie donc chaleureusement ».
Charline : « je savais que l’armée française torturait des hommes, mais je ne pensais pas qu’elle le faisait aussi sur des jeunes de quatorze ans (….) je suis de tout cœur avec vous dans votre cause (…. ) il faut établir la vérité sur des faits, mais surtout la transmettre (….) de véritables témoignages apportent une autre dimension aux cours que nous suivons (….) enfin je suis d’accord avec vous pour ne pas accepter cette pension d’ancien combattant, j’aurais fait la même chose ».
Maxence : « j’ai trouvé cette rencontre très intéressante, car elle prouve que jamais une mémoire officielle ne pourra être instaurée, comme cela aurait pu être le cas ».
Léa et Flavie ont particulièrement apprécié la diversité des opinions et des points de vue des intervenants, « cela permet une approche différente des événements ».
Eglantine : « ces quatre personnes (les intervenants) ont su personnellement me toucher ; j’ai eu les larmes aux yeux quand Stanislas a raconté l’histoire du jeune garçon, cette histoire m’a bouleversée, je vais aller lire ce récit »
Elysa : « ces quatre personnes, malgré leur passé parfois douloureux, prouvent que la paix est envisageable. Comme dit l’un d’eux : il suffit que chacun apporte sa pierre au mur de la paix. Ces hommes ont une vision encourageante du monde, malgré les attentats et les guerres (….) face à la réalité des faits, j’ai pu imaginer le vécu de mon grand-père qui a toujours gardé le silence (….) je les remercie et je leur suis reconnaissante… »
A notre tour, nous tenons à remercier ces jeunes gens et jeunes filles pour la qualité et le tact de leurs interventions. Et merci aux enseignants pour leur accueil et le travail de préparation et de suivi réalisé avec leurs élèves.
Messages
1. Les lycéens et nous : question(s) de mémoire(s) , 28 avril 2016, 17:26, par Xavier Jacquey
Chapeau pour les intervenants et pour les lycéens !