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Les pieds tanqués. Quand la guerre d’Algérie se revit au théâtre
mardi 4 août 2015, par
Une partie de pétanque. On est à Marseille. Un Provençal, un Arabe, un Pied-noir et un Parisien tchatchent à tout va. Au détour d’une réplique, l’Algérie surgit, Ils s’affrontent, livrent leur vérité, chacun avec sa déchirure secrète, son lien intime avec la guerre d’Algérie. C’est émouvant, parfois douloureux, mais après tout, il faut quand même la finir cette partie de pétanque !
Une pièce de théâtre où les mémoires s’entrechoquent, une comédie à la fois drôle et grave sur ce thème très actuel : comment vivre ensemble aujourd’hui après avoir été adversaires pendant la guerre d’Algérie ?
Extrait
Le Parisien : ……….. l’Algérie est devenue indépendante. C’était le sens de l’Histoire
Le Pied-noir : le sens de l’Histoire ? Ça veut rien dire, ça ! L’Histoire on l’écrit toujours après. S’il y avaiy eu un type, à l’époque, avec suffisamment de couilles pour dire que l’Algérie devait rester la France, elle serait restée la France ! Et ça aurait été aussi le sens de l’Histoire. Mais un autre, c’est tout…
L’Arabe : tu crois qu’il n’en a pas fallu, des couilles, pour déclarer l’Algérie indépendante ?
Le Pied-noir : on auraut dû leur faire bouffer, comme il faisait le FLN ! Ce groupuscule d’assassins. Ces soi-disant nationalistes qui ont fait leur révolution en terrorisant les populations musulmanes, leurs propres frères ! En les ralliant par la force et la peur.
L’Arabe : si la France avait tenu ses promesses ! Si elle avait accompli son idéal de progrès, de justice, de liberté. Si les Français lui avaient fait entrevoir autre chose que la misère, tu crois qu’il ne l’aurait pas embrassée de tout son être, la France ? Tu crois vraiment qu’il se serait soulevé en masse pour suivre le fellagha, crispé sur sa religion, sa langue, ses coutumes ?
Le Pied-noir : tu l’as dit, Yaya ! L’Arabe, le musulman, il ne voulait pas être Français !
L’Arabe : il le voulait, Zé ! Mais à force d’attendre… Après un siècle de colonisation, après s’être fait trouer la peau en Europe pendant les guerres. Après avoir demandé des droits nouveaux et maintes et maintes fois la reconnaissance de « la grande patrie universelle ». Après toutes ces démonstrations, ces supplications, comprendre, finalement qu’il serait et resterait toujours l’indigène, le sous-français, qu’il ne cesserait jamais de l’être ! Après tout ce temps, Zé, oui, après ça, il ne l’a plus voulu.
Le Pied-noir : nous, on n’était pas des colons. On était des pauvres gens qu’on a chassés de chez nous.
L’Arabe : sauf que vous n’étiez pas chez vous.
Le ¨Pied-noir : depuis cinq ou six générations, on n’était pas chez nous ? Tu veux mon poing dans la gueule ?
L’Arabe : on vous l’a fait croire et vous l’avez cru ! Pendant plus de cent ans vos responsables vous l’ont martelé : l’Algérie c’est la France. On vous trompait et vous applaudissiez !
Le Pied-noir : et à quoi on pouvait croire ? On a fait ce pays. On l’a construit avec notre sang…
L’Arabe : avec le leur aussi…
Le Pied-noir : on était coupables de quoi ? De nous sentir chez nous ? On a inventé un pays, une culture !Des Grecs, des Maltais, des Espagnols, des Italiens, des Juifs … Et tout ça grouillait ensemble… Je sais même pas par quel miracle !
L’Arabe : et neuf millions d’Arabes, invisibles à vos yeux….
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La pièce est actuellement en tournée dans toute la France. Si elle passe par chez vous, n’hésitez surtout pas ! Vous passerez un moment drôle et en même temps émouvant et grave. Cliquez sur ce lien pour savoir les dates et lieux de représentation
Les Pieds tanqués, une pièce écrite et mise en scène par Philippe Chuyen
Le texte est édité aux « Cahiers de l’égaré »
http://cahiersegare.over-blog.com
Messages
1. Les pieds tanqués. Quand la guerre d’Algérie se revit au théâtre , 8 août 2016, 23:59, par barbara
ah si les « petits pied noirs » avaient eu connaissance du code de l’indigeanat et du code forestier qui étranglait les algériens, sans doute qu’une solution a la sud africaine aurait été possible ! mais par faiblesse politique sans nul doute, nous avons vécu dans un rêve
! dommage, nous l’avons payé cash nous les petits !