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Simone de Bollardière, épouse de général, femme libre et militante de la paix, est morte

mercredi 9 décembre 2020, par Anne Doussin , Michel Berthelemy

Simone de Bollardière nous a quittés le dimanche 6 décembre 2020, elle avait 98 ans.

Elle était de tous les combats, dès qu’il s’agissait de défendre la dignité humaine et la paix.
Du soutien à des familles dans le besoin à la défense de la gare de Quimperlé, de la lutte contre l’implantation de la centrale nucléaire de Plogoff à la solidarité avec les militants du Larzac, elle déployait son énergie sans compter au bénéfice de la non-violence et du mieux-vivre ensemble.

Quand, en 2005, elle a appris la création de la 4ACG, elle a aussitôt envoyé un message aux fondateurs : « Bravo ! mon mari serait fier de vous ! ». Elle a donc assisté à la première assemblée générale de l’association à Albi.

Simone de Bollardière, au centre, à l’assemblée générale d’Annecy
Victor Personnaz - 4acg

Depuis ce jour, elle ne nous a plus quittés, nous accompagnant souvent dans les lycées pour témoigner contre la guerre et la violence. Dans son « tour de l’Ouest » des lycées, elle disait fréquemment aux élèves ébahis : « méfiez-vous de l’obéissance ». Tous ces jeunes et leurs professeurs nous exprimaient leur d’intérêt pour ses interventions, et surtout leur admiration pour sa parole libre et directe.

2009 : Inauguration de la rue Général de Bollardière, suite au travail de lycéens auprés de la municipalité. Rezé (44)

Elle se disait très fière d’avoir été désignée « Présidente d’honneur » d’une association proche des valeurs de son époux, le Général Jacques Pâris de Bollardière qui, pour avoir protesté contre l’usage de la torture en Algérie, a fait deux mois de forteresse puis a quitté l’Armée pour s’engager dans des actions de paix.
"Pourquoi mon mari a refusé la torture ? Quand on me pose cette question je suis pétrifiée, parce que ce n’est pas une question, c’est une évidence. On vient de sortir de la guerre contre les nazis, on ne va pas faire la même chose !" (entretien avec Sophie et Emmanuel Audrain, janvier 2012).
En découvrant son histoire, notre ami André Gazut décide, en 1974, d’en faire un film, « Le général de Bollardière et la torture ». La diffusion est interdite en France. Au début des années 2000, au moment des révélations sur la torture, notamment dans le journal Le Monde, Simone de Bolardière et André Gazut se lancent dans une tournée de projections militantes en sillonnant la France. Un soir, après la projection, de jeunes Algériens s’adressent à Simone de Bollardière : « Quoi ? Il y a un officier supérieur qui a fait ça ? Mais Madame, il faut faire des tee-shirts de lui et on en portera ! »

C’est elle encore qui, un jour, a entraîné son mari à assister à une conférence de Jean-Marie Muller sur la non-violence. « Tous les mots qu’il prononçait, mon mari les ressentait au plus profond de lui. Nous sommes allés le saluer, ils sont tombés dans les bras l’un de l’autre ».

En 2013, au cours d’un voyage en Algérie avec des membres de la 4acg, elle rencontre, devant la caméra d’Emmanuel Audrain, une ancienne moudjahidate, Louisette Ighilariz, qui avait été torturée par les militaires français durant la bataille d’Alger. Physiquement diminuée, elle avait tenu à rencontrer celle dont le mari avait dénoncé la torture. Dans l’émotion générale, elles se sont embrassées et ont échangé quelques mots en pleurant l’une et l’autre.

Rencontre avec Louisette Ighilariz lors d’un voyage en Algérie en 2013
Emmanuel Audrain, film retour en Algérie

Quelques jours avant sa mort, Emmanuel Audrain lui rend visite. « Elle était très fatiguée, confie Emmanuel, elle disait se sentir proche de sa fin de vie… Avec son assistante Nelly, on s’est mis tous les trois à fredonner « La tendresse » et « Mon amie la rose ».
Elle est partie sereine, en paix.

Très souvent, rappelle Emmanuel, elle s’adressait aux anciens appelés que nous sommes en disant « Vous avez su transformer l’horreur en élan de vérité et de justice. Vous êtes merveilleux ! ».

Adieu Simone, vous aussi vous étiez merveilleuse. Vous nous avez fait partager votre foi en l’homme. Merci !

Sources :
– ?Emmanuel Audrain, cinéaste, réalisateur notamment de « Retour en Algérie » (Le Goût du large, 2014)
– ?André Gazut, réalisateur de « Le général de Bollardière et la torture » (1974) : interview dans « L’Union pacifiste » de novembre 2020


DOC Algérie 2006 - Le général qui a dit "non" à la torture - Jacques Pâris de Bollardière
https://youtu.be/XIUDzpzSx1U

Messages

  • J’ai eu la chance de connaître simone lors de ce voyage de 1913.
    J’ai le souvenir de sa rencontre avec lousette Ighilariz ; ce fut un moment d’intense émotion.
    Je me souviens egalement de sa blessure a une jambe et de wa reparation à l’hôpital d’Alger.
    Vraiment j’ai le souvenir d’une femme ex.extraordinaire.
    Fernand Poncet.

  • sinceres condoleances et reaffirmation d’un souvenir impérissable de ce couple exceptionnel.

  • Nous apprenons le décès de Mme Simone de Bollardière.
    Mme de Bollardière était très active dans les combats contre le système de la torture en Algérie, pour la vérité sur la mort de Maurice Audin et la reconnaissance de la responsabilité de l’État. Elle était de tous les appels, de toutes les actions auprès de Josette Audin.
    Au nom de l’Association Josette et Maurice Audin , je tiens à vous exprimer nos plus sincères condoléances et nos sentiments les plus solidaires.
    Si vous le pouvez, merci de partager ce message avec sa famille.
    Bien solidairement
    Pierre Mansat
    Président de l’Association Josette et Maurice Audin

  • (Commentaire envoyé par mon ami Nouredine Turqui, D’Alger. )

    Méfiez-vous de l’obéissance ! Quel esprit, quel cœur pour une séniore de plus de 90ans encore être à cheval sur de nobles principes telle la liberté. A travers son état d’esprit olympien vous l’aviez adoré elle vous a adoré, avec un lien aussi fort d’humanité, je m’imagine quelle splendide ambiance était ressenti entre vous.
    Garder son beau principe comme celui de son feu époux, faut croire que cette grande dame, malgré les traits de vieillesse, sa fougue contre la servitude ou le mépris envers son prochain, est prouvé par un esprit et un cœur qui ont su se prémunir contre l’usure du temps.
    Ô ! Combien aurais-je souhaité être en sa compagnie quand il y a lieu de débattre sur la liberté, la justice.

    Méfiez-vous de l’obéissance ! Quel fort conseil. Il prouve que la personne qui l’utilise pour éveiller les âmes populaires est une imposante dame dans une situation où il faut mettre les choses à leur place.

    J’ai énormément apprécié la maxime ’’Méfiez-vous de l’obéissance’ elle réveille les consciences suceptibles de se faire rouler dans la farine par des politiques imposteurs. A vouloir mettre au pas les citoyens, les politiques malveillants sauront toujours utiliser les mots pour tranquilliser leurs citoyens en les conduisant à l’enfer social.

    En Algérie, le peuple était tellement content d’être indépendant et de voir l’emblème flotter au-dessus de leur tête, par ignorance, le fait de croire facilement aux discours amplifiés de justice, de ’liberté’ de respects des lois, esprit nationaliste, voilà que le peuple se laissait mollement entrainer dans une toile d’araignée. Une telle situation ne lui permettait plus de bouger, à tel point où il tomba dans l’obéissance synonyme de tyrannie.

    Madame Simone Bollardière, l’idée de ne pas vivre en soumission, la ressentait en elle comme une braise. Voire le désordre qu’a pu créer le ou la Covid-19 au point où le confinement, les gestes barrières ont été une opportunité aux politiques d’imposer aux peuples des réglementations altérant la liberté individuelle, touchant même l’intimité des familles. N’est-ce pas ridicule, mais c’est une imposture, d’arrêter un nombre de convives en famille le jour des réveillons ?

  • Le bulletin de janvier 2021 de l’ACCA (Agir Contre le Colonialisme Aujourd’hui ) consacre un article à Simone de Bollardière : ’’Une amie très proche nous a quittés. ’’
    C’est le bulletin des ’’soldats du refus ’’ dont Simone était membre du conseil national.
    l’article est signé de Latifa Madani.
    C’est dans cet esprit que Simone de Bollardière m’a répondu en mai 2003 :
    ’’ Sans doute, si vous aviez été Algérien, vous auriez été résistant comme mon mari dans le maquis des Ardennes. ’’
    À cette époque peu de gens répondaient ainsi à cette question que je m’étais souvent posée comme appelé opérationnel dans le ’’Bled ’’ oranais.

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