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Kateb Yacine et le 17 octobre 1961

jeudi 14 octobre 2021, par Michel Berthelemy , Georges Lagier

En 2006, l’intellectuel algérien Benamar Mediène publie « Kateb Yacine, le cœur entre les dents » aux éditions Robert Laffont. Georges Lagier nous rappelle cet extrait de l’ouvrage, au moment où est commémoré le soixantième anniversaire des massacres du 17 octobre 1961 à Paris.

17 octobre 1961

« Quand je pense à cette nuit de chasse à l’homme, me dit Yacine les dents serrées, je vois la Seine comme une mauvaise balafre sur le visage de Paris. Les Parisiens en robe de chambre et charentaises se cultivaient à la télévision, devant « Au Théâtre ce soir » …Ils n’ont rien vu, rien entendu »
Le Vel’d’Hiv et le dépôt de Vincennes, comme en 1942, faisaient le plein en nocturne. À quelle « Condition Humaine » pensait André Malraux, dans son cabinet ministériel en charge de la Culture ? A-t-il entendu les hurlements des Algériens que les policiers de la République balançaient par-dessus les parapets du pont Mirabeau chanté par Apollinaire. Les cris de centaines d’hommes que l’on noie portent loin. Elle est à deux pas de la Seine, la rue de Valois où la culture française se pense par un Malraux se rongeant les ongles…
Ce 17 octobre 1961 de Paris prolongeait le 11 décembre 1960 d’Alger.
Tout Paris des immigrés algériens, des bidonvilles de Nanterre, d’Asnières, de Gennevilliers… refusant l’humiliation d’un couvre-feu insensé et rejetant la forfaiture suprême, se sont retrouvés pris dans la gueule du loup gris en capeline bleu nuit
Tu as écrit ces strophes :

Peuple français, tu as tout vu
Oui, tout vu de tes propres yeux
Tu as vu la police
Assommer les manifestants
Et les jeter dans la Seine
La Seine rougissante
N’a pas cessé les jours suivants
De vomir à la face
Du peuple de la Commune
Ces corps martyrisés (…)
Et maintenant vas-tu parler ?
Et maintenant vas-tu te taire ?

Benamar Mediène

Pierre Vidal – Naquet, outré, a bien dit que toutes ces atrocités n’ont pas ébranlé Paris ni accablé les Parisiens et que s’il n’y avait pas eu des témoins oculaires tels que le journaliste photographe Elie Kagan et le cinéaste Jacques Panigel, le mensonge d’État recouvrirait encore le fleuve et ses morts .

17 octobre 1961
Photo Elie Kagan

Messages

  • Pourquoi les peuples se laissent-ils toujours tromper ?
    En Irak, dans la guerre dite contre le terrorisme, 801 000 morts dont plus de la moitié de civils, femmes et enfants compris.
    Ce chiffre vient d’être donné par une étude américaine il y a quelques semaines.
    On a mis plus d’un an à nous montrer l’ampleur des destructions des villes irakiennes, de Mossoul en particulier. Combien d’années pour les victimes ?
    Il faut parler de l’histoire mais ne pas attendre 50 ans pour parler de notre présent alors qu’aujourd’hui nous avons plus de moyens pour savoir ce qui se passe.

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