Accueil > Vie de l’association > Réhabilitation des Fusillés pour l’Exemple : où en est-on ?
Réhabilitation des Fusillés pour l’Exemple : où en est-on ?
jeudi 22 octobre 2015, par
Le 17 Octobre 2015, à l’approche des commémorations du 11 novembre, la 4ACG réitère sa demande de réhabilitation des Fusillés pour l’exemple de la guerre 1914-1918, et adresse une lettre à Monsieur Jean-Marc TODESCHINI Secrétaire d’Etat auprès du Ministre de la défense, chargé des Anciens Combattants et de la Mémoire.
Monsieur le Ministre,
En 1998 Monsieur Lionel Jospin, alors Premier Ministre, a déclaré sa volonté, lors des cérémonies des 80 ans de l’Armistice" de la guerre de 1914-1918, à propos des « fusillés pour l’exemple », que « ces soldats, désignés pour l’exemple réintègrent pleinement notre mémoire collective nationale ». Il n’a pu aller au bout de ses intentions.
Nous avons entendu non sans émotion le discours du Président Nicolas Sarkozy, prononcé le 11 novembre 2008 à la Nécropole Nationale de Douaumont, à propos des Fusillés pour l’exemple de 1914-1918
« Mais aujourd’hui, en ce 11 novembre 2008, alors que presque tous les témoins de cette tragédie ont disparu, alors qu’en France le dernier soldat survivant de cette guerre atroce n’est plus, alors que les haines se sont éteintes, que l’esprit de revanche a disparu, que nul parmi ceux qui se sont tant combattus ne songe plus à dominer l’autre, le temps est venu d’honorer tous les morts ».
Ceci est l’exacte réalité de ce qui s’est passé dans l’horreur de la guerre et des tranchées, sous les obus et la mitraille, dans le sang, la boue et la mort. Hélas Monsieur Sarkozy n’a pas osé aller jusqu’au bout de sa conviction.
Étant Président du Conseil général de la Corrèze, Monsieur François Hollande s’était prononcé pour une réhabilitation collective. Il n’a pas encore donné suite à cet engagement. Votre prédécesseur, à ce poste à haute valeur morale, avait indiqué qu’il fallait regarder chaque cas particulier après s’être félicité d’avoir attribué la mention « Mort pour la France » au sous-lieutenant Jean-Julien-Marie Chapelant fusillé pour l’exemple, en précisant qu’il fallait « regarder » chacun des cas particuliers. Il en est resté là, ce qui est moralement décevant.
Le problème n’est pas de savoir si les fusillés pour l’exemple étaient innocents, mais s’ils étaient coupables ! Alors que 20% des dossiers des Conseils de guerre exceptionnels ont été détruits, alors que ces dossiers ont été constitués exclusivement à charge par les fusilleurs, alors qu’il n’y a plus ni accusateurs et ni témoins de la défense, comment rendre une vraie justice ? Et s’ils sont déclarés coupables, de quoi seront-ils coupables ?
Et s’il faut chercher des coupables alors nous demanderons le même examen pour la responsabilité des généraux, notamment Nivelle et Pétain, dans les massacres éhontés et inutiles de milliers de fantassins montant à l’assaut et promis à une mort certaine pour des opérations vouées à l’échec.
Alors, si les mots ont un sens - et les mots ont un sens - vous devez participer à réhabiliter les 650 soldats fusillés pour l’exemple. Réhabilitation n’est pas un mot qui fait injure à la mémoire de notre peuple, c’est un mot qui l’honorerait si vous décidiez de le prononcer.
Les fusillés pour l’exemple ne se sont pas déshonorés, n’ont pas été des lâches. Étant allés simplement jusqu’à l’extrême limite de leurs forces, ils ont été désignés et jugés par l’arbitraire militaire.
Nous vous demandons la réhabilitation globale de ces fusillés pour l’exemple afin de réunir enfin toutes les victimes de cette immense boucherie impitoyable. Plus de bons ou de mauvais morts. Seulement des morts.
A Craonne, sur le plateau, pendant l’offensive Nivelle, il y a eu 900 morts en moyenne par jour. Le prix du sang : 150 000 morts en 48 heures en avril 1917.
Ils refusaient de se battre et de mourir pour rien.
Ils voulaient mettre fin à la boucherie.
Ils refusaient de massacrer d’autres hommes sous d’autres uniformes.
Ils fraternisaient au-delà des tranchées.
Ils voulaient la paix et la liberté.
Morts pour qui ?
Morts pour quoi ?
Ils étaient nos grands-pères, ils étaient nos pères. Ils étaient tout, et ils ne furent plus rien.
La souffrance de leurs parents, de leurs épouses, de leurs enfants fut aussi intense que toutes les souffrances de toutes les familles de tous les morts.
Le Royaume Uni a adopté en 2008 une loi sur la grâce des soldats de la Première guerre mondiale, loi sur la grâce des soldats de l’Empire Britannique exécutés durant la guerre de 1914-1918 pour délit de lâcheté, de désertion ou tentative de désertion, désobéissance, abandon de poste, pour s’être endormi à leur poste, avoir jeté les armes ou frappé un supérieur ou pour des buts similaires. Malgré les différences juridiques et la législation de nos deux pays, nous attendons de la République Française une décision de même nature. Pour être juste, la mesure doit s’appliquer à tous.
Nous demandons justice pour les fusillés pour l’exemple de la première guerre mondiale.
La réhabilitation ne saurait être juridique :
– car elle serait alors « au cas par cas » et ne déboucherait éventuellement que dans des années et pas pour tous les Fusillés pour l’exemple.
– car plus de 20% des dossiers des Conseils de guerre ont été détruits.
– car il n’y a plus aucun témoin de ces actes.
– car les dossiers qui restent ont tous été constitués à charge par les fusilleurs.
Comment dès lors pourrait passer une justice sereine et impartiale ?
La réhabilitation doit être collective :
– car il est impossible de différencier les cas des fusillés.
– car il faut appliquer le principe qu’il vaut mieux un coupable en liberté qu’un innocent condamné.
– car les soldats exécutés ont été fusillés collectivement par des pelotons d’exécution et devant les troupes rassemblées.
– car ces assassinats par la France ont été faits pour terroriser la conscience collective des troupes sur le front.
La 4ACG (Anciens Appelés en Algérie et leurs Amis Contre la Guerre) demande que la République rende hommage aux 650 Fusillés pour l’exemple par tous moyens qu’elle déciderait, pour que leur mémoire soit honorée et perdure dans l’histoire de notre pays.
Monsieur le Ministre, réhabilitez les Fusillés pour l’exemple. Vous en avez le pouvoir, nous vous demandons de vous en faire un devoir.
Dans l’attente de votre réponse, nous vous prions, Monsieur le Ministre, de recevoir l’expression de notre profond attachement à la paix et de nos sentiments républicains.
Le Président de la 4ACG
Alain Desjardin
Messages
1. Réhabilitation des Fusillés pour l’Exemple : où en est-on ? , 10 novembre 2015, 17:40, par crinon bernard
« « Je » » demande la réhabilitation collective de tous les fusillés pour l’exemple.Pleinement d’accord avec cette lettre
2. Réhabilitation des Fusillés pour l’Exemple : où en est-on ? , 18 novembre 2015, 12:25, par viot
Bonjour,
Très bien ce courrier.
Je rentre d’Auxerre où j’ai animé une conférence sur ce sujet.
Il faut que les gens sachent ce qui s’est passé.
Si vous souhaitez organiser une conférence sur ce sujet n’hésitez pas à me contacter.
Bien cordialement
Eric Viot
3. 14-18 et Algérie , 20 janvier 2016, 13:45, par Kobisch Paul
En tant que déserteur pendant la guerre d’Algérie, je demande depuis 1981 à tous les Présidents de la République, la réhabilitation de tous ceux qui ont été condamnés pour insoumission ou désertion. En Allemagne il y eut 40 000 déserteurs pendant la seconde Guerre Mondiale, et le gouvernement a fini par faire en 2002 une loi ad hoc, très généreuse. La République française ne sait pas pardonner, ça on le savait, mais le pire est sa cécité face à ses devoirs fondamentaux.
4. Réhabilitation des Fusillés pour l’Exemple : où en est-on ? , 4 janvier 2018, 17:42, par choeur
Chers Amis, à ce sujet, je dois vous signaler l’initiative exemplaire prise par le Maire de CHAUNY (02) en vue de faire élever un monument à leurs mémoires, vous pourrez avoir plus renseignements en regardant sur google "monument aux fusillés pour l’exemple à CHAUNY" j’ai d’ailleurs fait un courrier de félicitations à ce courageux élu. Cordialement JM CHOEUR